Les Chants de Mandrin
Je regarde à peu près tous les films se passant au XVIIIème siècle, avec assez d’ouverture d’esprit pour pouvoir aimer à la fois Le Pacte des Loups et Barry Lyndon, Dangerous Liaisons et Plunkett & McLeane. Et comme les gangstaz à tricorne font partie de mes sujets de prédilection, j’ai profité d’un passage à Paris pour voir Les Chants de Mandrin de Rabah Ameur-Zaïmeche.
Ici pas de biopic historicisant ni de combat de kung-fu, on est dans le film d’auteur. C’est assez rafraichissant de voir du film “en costume” traité avec des outils utilisés d’habitude pour des histoires contemporaines. Visuellement, le film est très plaisant, avec de belles lumières naturelles, des paysages magnifiques et des costumes qui ne font pas clinquants comme, au hasard, ceux de Rani. Le plaisir des oreilles n’est pas en reste, avec de très chouettes duos tambour-flûte et vielle à roue-violon. Encore une fois ça change des envolées de cordes pompières ou des solos de clavecin. Mais je suis venu voir un film, pas un clip, et j’ai des attentes assez classiques en la matière: une histoire et des personnages.
Les Chants de Mandrin est un film contemplatif diront les cinéphiles, un film chiant diront les autres. L’intrigue tient en une phrase: après l’exécution du fameux contrebandier, la bande à Mandrin se lance dans une nouvelle campagne de trafic et dans l’impression de Chants à la gloire du défunt chef. Les protagonistes sont à peine esquissés et c’est dommage, car il y avait de chouettes gueules, quelques vrais charismes, une belle gouaille, donc possibilité de développer de vrais personnages. Là ce ne sont que bandits interchangeables, qui gueulent tous “Vive la contrebande! Vive Mandrin!”. Pourtant, sur ce même sujet, il y avait moyen d’explorer le destin d’un groupe après la mort de son chef (esquivé ici car la bande est clairement reprise par le lieutenant) ou de parler d’impôts, de totalitarisme, voire de la création d’une légende. Mais aucun de ces axes n’est vraiment traité. Le colporteur et le noble qui rencontrent la bande discutent bien un peu d’inégalités sociales mais c’est du niveau école primaire. Je ne suis même pas sûr que le spectateur de base réalise vraiment ce que vivre sous le joug des Fermiers Généraux signifiait.
Tout est effleuré, à peine évoqué dans des dialogues ultra courts mais presque aussi palpitants que dans un Eric Rohmer, servis par des acteurs pros ou non et pas toujours à l’aise. Alors ça laisse du temps pour des plans de chevaux qui courent dans l’herbe et d’humains qui marchent dans les broussailles. On a parfois l’impression que le réalisateur était tellement content d’avoir un carrosse et des canassons qu’il a mis l’accent dessus et en a oublié de nous raconter une histoire.
Conclusion: pour moi pas de regrets: je suis content que des gens veuillent sortir du carcan et fassent des films qui ne donnent pas forcément ce qu’on attend d’eux. Mais là c’était juste pas ma came.
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